Quel avenir pour le Département ?

Discours de Guillaume Lepers, Président du groupe L’Avenir ensemble, lors du débat sur le budget primitif le 6 avril 2018.

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Au delà des postures qui nourrissent la démocratie dans cet hémicycle et des divergences de fond qui sont les nôtres, nous sommes, aujourd’hui, tous, bien conscients de la réalité de la situation du Département. L’inverse serait d’ailleurs inquiétant.

Les grandes lignes de ce budget primitif 2018 viennent confirmer ce que nous savions déjà, et que nous avions relevé lors du débat d’orientations budgétaires, le Conseil Départemental est devenu une collectivité fragile et, malheureusement, trop impuissante pour demeurer un moteur essentiel du territoire.

Certes, la hausse de la fiscalité imposée aux contribuables Lot-et-Garonnais en 2017 et le recul continu de nos interventions stabilisent péniblement le budget 2018. Mais, force est de constater que le contexte s’alourdit et interpelle les Lot-et-Garonnais de toutes conditions.

Avec une enveloppe d’aide aux collectivités toujours plus réduite (30% de baisse pour cette année), des régimes de subventions en matière culturelle et sportive toujours plus limités et un volume d’investissements ramené au strict minimum (et encore), le Département voit progressivement ses capacités d’action disparaître.

Pire encore, sans concertation et malgré des engagements signés, vous avez dû, Monsieur le Président, geler récemment les grands investissements d’infrastructures prévus sur le territoire. Le dédoublement de la RN21, le barreau et le pont de Camélat, la rocade de Marmande, le pont du Mas d’Agenais… des projets pourtant essentiels au Lot-et-Garonne.

Malgré les quelques artifices dépassés de votre communication, votre discours a tout de même évolué. Vous avez fini par abandonner le fameux « rebond » dont vous nous avez rebattus les oreilles en ce début d’année. Peut-être avez-vous enfin choisi de faire face à la réalité compliquée à laquelle notre collectivité est confrontée…

Durant des années, le Conseil Général a été le cœur du développement et de l’aménagement du Lot-et-Garonne. Il a permis la mise en place de grandes infrastructures et la concrétisation de projets majeurs pour le territoire. La création de l’agropole, la réalisation des contournements d’Agen, Marmande et Villeneuve-sur-Lot, les politiques d’accompagnement agricole et de soutien à l’artisanat,… autant d’exemples qui nous rappellent que le Conseil Général était un échelon incontournable.

Aujourd’hui, la situation est bien différente. Le Conseil Départemental n’a plus ni les compétences, ni les moyens financiers d’assumer des projets d’infrastructures, même des plus modestes.

Je regrette, également, qu’il n’ait plus, hélas, ni imagination fertile, ni faculté d’adaptation parce que toujours figé dans ses certitudes.

Voilà une réalité bien difficile à accepter mais qui ne suffira pas à faire fléchir les sphères parisiennes. Alors que la plupart des Départements présentent, en 2018, une bonne santé financière – comme le démontre les chiffres du rapport de la cour des comptes de 2017 – nous devons faire preuve de lucidité : le secours de l’Etat ne viendra pas ! La compensation financière des allocations individuelles de solidarité, que vous n’avez pas réussi à obtenir avant 2017 alors que vous pensiez avoir des relais importants à Paris, se fera encore attendre. Nous n’aurons rien de plus que les quelques aumônes concédés année après année.

Nous n’avons donc plus le choix. Il nous faut apprendre à nous débrouiller seul. Cela signifie faire des choix, assumer nos compétences obligatoires et surtout revoir nos ambitions à la hauteur de nos moyens. Arrêtons de vouloir faire croire à la toute puissance du Département comme c’est encore le cas dans le plan pluriannuel d’investissements irréaliste qui nous est présenté dans ce budget primitif 2018.

Mon propos, ce matin, n’a pas vocation à enterrer le Conseil Départemental, bien au contraire. Je suis convaincu de sa nécessité.

Il est nécessaire parce que nous avons besoin d’un échelon intermédiaire dans cette grande région « Nouvelle Aquitaine ». Une région bien grande. Trop grande. Une taille de région dont vous avez approuvé le projet, Monsieur le Président.

Il est nécessaire parce qu’il est un lieu de ressources et d’accueil familier pour bon nombre de nos concitoyens. De par son rôle dans le domaine social, de par ses relations avec le monde associatif, le Département reste une strate de proximité essentielle notamment pour les plus fragiles.

Mais, il ne faut pas seulement communiquer sur cette notion de proximité, il nous faut la concrétiser en privilégiant une logique d’échanges et de partenariat plus qu’une logique de guichet.

Le Conseil Départemental est nécessaire également, en termes d’aménagement, dans son rôle d’animateur de l’action locale. Nous devons renforcer ce rôle et imposer le Département comme le véritable chef d’orchestre d’une action coordonnée du territoire en développant ses liens avec les intercommunalités en particulier.

Il ne s’agit pas simplement de convoquer les Présidents de communautés d’agglomérations à une « Conférence des territoires » purement cosmétique. Vous ne pouvez pas, comme vous l’avez fait, les réunir une fois les décisions déjà prises pour éviter de perdre la face – d’autant que les sujets importants n’étaient même pas à l’ordre du jour.

Un dialogue sincère et une réelle confiance doivent s’installer pour penser et initier l’action sur le territoire. Ainsi, nous serons en mesure de porter, ensemble, une vision unique et commune des priorités pour notre Département. Seul ce travail de coordination entre le Conseil Départemental et les intercommunalités nous permettra de peser dans la Nouvelle Aquitaine et de concrétiser de grands projets.

Chers collègues, le Département suscite encore de nombreuses attentes. Nous nous devons de le faire évoluer et l’adapter, afin qu’il réponde au mieux aux enjeux à venir. Loin des beaux discours, qui n’apportent que désillusions et méfiance, ayons enfin le courage de dire quel Département nous voulons pour demain.

Je vous remercie.

Guillaume LEPERS

 

Crédits photos : XC – Conseil départemental