Discours d’Alain Merly lors de la session du 25 novembre

Monsieur le Président,

Mes chers collègues,

Notre pays est malade. Malade de son histoire, de ses certitudes. Malade de son incapacité à comprendre les changements du monde. Malade de ses divisions. Et à vrai dire, malade de ses institutions.

L’ampleur et la force de cette tempête qui secoue notre pays renvoient nos débats au rang des choses secondaires. Pour ne pas dire dérisoires.

Dans un tel contexte, je n’ai pas le cœur à contrarier l’expression de vos motifs d’autosatisfaction. Vient toujours le temps où les paroles n’ont plus de sens, où seules les actions comptent. Comme tous les citoyens de ce pays, les Lot-et-Garonnais ne se payent pas de mots. Les vertus que vous accordez à la gouvernance nationale sont aussi celles dont vous vous prévalez. Je vous laisse à vos convictions et à votre aveuglement.

Comme vos amis du gouvernement, vous choisissez les subtilités du langage pour nous laisser croire et espérer ; comme vos amis du gouvernement, vous préférez l’idéologie au pragmatisme.

Alors, Monsieur le Président, avant que vous ne manifestiez votre indignation, votre surprise ou votre déception. Et surtout pour vous éviter ces désagréments. Je vous demande la permission de ne pas être d’accord avec vous.

J’évoquerai donc notre situation budgétaire pour me joindre, hélas, à ce que vous nous confirmez : vous n’avez plus de marges de manœuvre, pris dans l’étaux de vos compétences obligatoires. Elles mobilisent toujours plus nos ressources.

Je note au passage que les manquements de l’Etat, que vous dénonciez hier avec force, vous paraissent moins scandaleux aujourd’hui.

Plus de marges de manœuvre donc. Restent les illusions, les mirages, les acrobaties, pour nous laisser croire à la maîtrise d’une politique départementale sérieuse.

La presse, les internautes qui suivent nos débats, ne pourront donc nourrir leur curiosité, ni conforter leur réflexion : cette session, certes décision modificative, ne porte que le triste message de la vacuité.

Beaucoup de mots toutefois pour dire si peu. Et c’est hélas devenu une habitude que cette prose administrative pour habiller le vide. Dans ce flot de verbe, nous avons relevé quelques observations.

Nous ne partageons pas votre enthousiasme et votre optimisme quant aux effets positifs de la garantie jeunes. Une fois de plus, la gauche joue sa partition favorite : les généreux, les solidaires et les bien-pensants sont de ce côté.

Autant que vous, nous mesurons les difficultés de notre jeunesse. Autant que vous nous comprenons l’impérieux besoin d’une action nationale qui porte l’avenir des jeunes générations.

Nous pensons que la garantie jeunes qui nous est proposée, même soumise à d’hypothétiques formations, ne portera pas la réponse. Pire même, nous pensons aux effets pervers de cette allocation. Enfin, et devant votre empressement à inscrire le Lot-et-Garonne dans cette voie, vous ne nous empêcherez pas de penser que cette pseudo-solidarité sent l’électoralisme à plein nez.

A l’heure où les Français, et les Lot-et-Garonnais en particulier, s’inquiètent de l’inexorable montée du chômage, des difficultés croissantes de nos entreprises, de nos artisans, du monde agricole. A l’heure où la pression fiscale étrangle nos concitoyens, alors même qu’ils doutent du bien-fondé de notre organisation territoriale, nous leur devons plus que jamais la transparence et le courage.

Comment, en effet, donner du crédit à vos affirmations quand vous prétendez maintenir un niveau important d’investissements, alors que vous savez pertinemment que cela est faux, et que seuls les artifices budgétaires permettent d’afficher des chiffres flatteurs, que le compte administratif censure implacablement.

Je vous le demande donc une nouvelle fois, Monsieur le Président. Mettons fin aux discours surannés et travaillons vraiment pour l’avenir des Lot-et-Garonnais. Tournons rapidement la page de cette décision modificative insipide et stérile. Et préparons un exercice 2014 qui réponde vraiment aux difficultés de nos concitoyens.

Il est inutile, voire suicidaire, de continuer à entretenir le rejet du politique, par des postures électoralistes et des décisions inconsistantes. La montée des extrêmes est une réalité. Elle se nourrit de notre incapacité à donner une réponse concrète aux besoins des Français. Et notre département est loin d’être épargné par ce phénomène, dont vous n’êtes pas exempts de tout reproche.

Ma conclusion, Monsieur le Président, chers collègues, fait échos aux premiers mots de mon intervention. Nous avons le devoir de réalisme. De pragmatisme. Le devoir d’action concrète. Le devoir de courage politique.

Mais nous, plus que d’autres, devons y ajouter le devoir d’humilité. Parce que nous, plus que d’autres, portons l’espoir et la confiance de nos concitoyens. Mais est-ce encore une vérité aujourd’hui ?

Je vous remercie.